Camembert
Pour qu’il n’y ait rien
Encore faut il qu’il y ait eu quelque chose
Le vide se remplit du plein et le ciel des étoiles
La haine se crochète à l’amour comme l’enfant au sein de sa mère
On peut se retourner brusquement sur soi
On sent quelque présence
Son alphabet commencé à la lettre X
N’eut que trois temps, trois petits tours pour arriver à Z
Z comme le zéro de la fin, du rien sauf du néant
Son infini lèche la pierre blanche, immaculée pour toujours
Mauvais plâtre d’où aucune divinité ne jaillira sous le ciseau de l’artiste
Plâtre muet sans regrets éternels juste comme un doigt sur la bouche
Ne pas ébruiter la présence du passager clandestin
Rampant silencieusement sous les ors de sa vie
Survolant les champs de batailles de la vie en héros ignoré
Chutant dans les gouffres insondables du bord du monde
Il s’est avancé invincible au devant de la mort
Il aura fallut l’enfant avec sa voix de vent dans les roselières
Avec sa main sur le froid de la vie inconnue, levant des yeux d’histoire vers sa mère
Pour qu’il croit de nouveau en l’homme caché dans le camembert
Retrouver de quels appétits il était né
Pour qu’il sache traverser les lambeaux de son histoire et se parer de leur lumière.
Fillette
Ses grandes mains blanches s’avancent et agrippent le corps
Tel le nouveau né en son sein maintenant il ballote
Elle soutient la tête, elle n’a plus peur
Elle sourit même
On lui a dit, va fillette
Va laver le mort
Elle a répondu pourquoi ?
Pourquoi laver le mort ?
Cela ne sert à rien
On lui a dit, va fillette
Va habiller le mort
Elle a répondu pourquoi ?
Pourquoi habiller le mort ?
Les morts n’attrapent pas froid
Mais ses mains ont fait couler l’eau
Mais ses doigts ont caressé la chevelure
Ses bras ont enserré les côtes froides
Ses bras ont soulagé le dos et la peine
Elle a fait comme si
Elle s’est excusée pour un geste un peu brusque
Elle lui a parlé, elle a chanté même
Elle a lavé, paré le corps inconnu
Elle a lavé pour faire quelque chose
On ne peut pas ne rien faire
On ne peut laisser faire
Elle a remis de l’ordre dans son monde
Ajustant une ceinture, un bouton récalcitrant
Elle est restée à le regarder longtemps
L’a trouvé beau, bien propre
Elle a été fière d’elle
Une dernière fois c’est penché vers lui
Avec infiniment de douceur a dégagé une mèche rebelle sur son front
Rajusté le noeud de cravate, frotté les souliers vernis
Au fur et à mesure son corps s’allégeait
Au fur et à mesure son âme s’élevait fraternisant avec lui
L’homme.