DORMIR (ou pas)
Tomber de sommeil
je tombe de sommeil
Monde égal
Berceuse
l'âme ne dort jamais
Le glas d'une mort temporaire
La tâche aveugle du sommeil
Jean-Luc Nancy
Froissures d’un lit vide
Dans le tableau, le Verrou de Fragonard, les deux personnages sont resserrés dans la partie droite, laissant la moitié gauche du tableau avec ce que certains ont dit dire, rien.
Pourtant Daniel Arasse, commente le « rien » dans le tableau et à partir de ce rien il refonde l’histoire. C’est comme si le « rien » était à lui seul porteur d’une l’histoire.
Ce rien, ici semble prendre place dans ce lit, un lit vide en quelque sorte. Mais pas tout à fait rien, ou pas tout à fait vide. Car, sous nos yeux, les draps froissés. Comme si ces draps voudraient nous dire quelque chose. Déjà notre imaginaire cherche le passé, cherche, non le « qui » mais le « qu’est-ce que ». Qu’est-ce que ces draps veulent nous dire ?
Que s’est passé durant ces heures dans ce lit ? Nul endormi, seule la blancheur qui s’étale sous nos yeux et semble vouloir taire toute élucubration sur l’intime glissé dans ces draps froissés. Froisser, le mot déjà porte en lui la dimension morale ; comme les mots peuvent froisser, blesser, choquer ; comme le frottement froisse, déforme et marque de ces plis le textile qui semble retenir et garder trace de ce corps, ou ces corps peut être, qui étreignent ou s’étreignent.
Sylvie Classe